Et si en nous permettant de repenser notre perception de l’échec, le jeu vidéo dopait notre estime de soi ? D’après une étude de l’université McGill, à Montréal, il serait même possible d’acquérir des automatismes cognitifs et de nouvelles habitudes de pensée plus positive grâce aux jeux vidéo. Prêt·e à regonfler votre ego ?
À première vue, cela peut sembler paradoxal : comment le jeu vidéo pourrait regonfler notre perception de nous-même alors même qu’il nous confronte encore et encore à l’échec ? Selon Michaël Stora, psychologue et fondateur-président de l’Observatoire des mondes numériques en sciences humaines (OMNSH), c’est précisément ce mécanisme qui aide à développer notre confiance en nous, car dans notre apprentissage de l’échec, c’est l’estime de soi qui se joue. “Dans une société axée sur la réussite professionnelle ou même scolaire, c’est appréciable qu’il y ait des espaces où l’on puisse apprendre à perdre. Car c’est en perdant que l’on apprend à gagner ! Il peut parfois s’avérer très difficile de gagner, mais en perdant, on apprend à adopter les bonnes stratégies. C’est un mécanisme psychique très important que d’être capable de persévérer.” A chaque partie, à chaque niveau, on progresse, jouer nous emmène d’un point A à un point B dans une dynamique d’ascension.
Échapper au jugement de l’autre
En plus de nous apprendre à persévérer, le jeu vidéo offre la possibilité d’échouer dans un safe space, un espace non éducatifoù l’on n’est pas jugé par des tierces personnes, mais souvent que par soi-même (lorsque l’on joue en solo, en multijoueur, les choses peuvent se compliquer). Les échecs même cuisants restent dans une autre réalité, ils peuvent avoir un impact sur notre humeur, mais ils nous aident surtout à nous construire, à être meilleur. Lorsque l’on meurt dans un jeu, la seule conséquence c’est de reprendre soit au dernier point de sauvegarde soit au début du jeu. Les conséquences sont très relatives. Pour Vanessa Lalo, psychologue clinicienne, spécialisée dans les jeux vidéo, les pratiques numériques et leurs impacts, le jeu “sera, tout au long de la vie, un refuge, un moyen, un outil, pour avancer dans une réalité parfois déplaisante.”
Impact cathartique et pouvoir narcissique
Parce qu’il nous permet de (re)devenir acteur·rice, le jeu vidéo a une fonction quasiment auto-thérapeutique. “Le jeu est un espace de récréation, dans le sens de re-création, il nous permet de revivre des tensions, des frustrations et des peines et de les surmonter”, ajoute Michaël Stora. C’est un espace qui permet d’échapper au monde réel, à des situations de la vie qui peuvent être compliquées et à les recréer pour enfin les dompter. Comme lorsque l’on lit un livre ou un film, quand on joue et que l’on imagine son avatar, on fait appel à la dimension cathartique de la fiction. Les jeux de simulation sont des classiques du genre ! En jouant, on incarne cet autre que l’on aimerait être ou que l’on a peur d’incarner. Chaque réussite, chaque avancée dans le jeu, renforce l’estime de soi. L’étude de l’université McGill prouve que les jeux permettant de réduire le taux de cortisol (l’hormone du stress) du·de la joueur·euse ont un impact conséquent sur la manière dont on se perçoit. A contrario, les jeux qui poussent à une compétitivité effrénée peuvent être dévalorisants, il s’agit alors d’être vigilant sur les émotions et sentiments ressentis. “En fonction des expériences qu’il va vivre (…), l’enfant va plus ou moins gagner en confiance ou au contraire en perdre”, prévient Aurélie Crétin, psychologue clinicienne formée aux Thérapies Comportementales et Cognitives dans Jeux de la confiance en soi, chez Hatier jeunesse.
Ainsi, et contrairement à une idée largement répandue, le jeu vidéo permet de bâtir une forte résilience chez l’individu en phase de construction (ou reconstruction) et permet d’implémenter l’idée essentielle qu’il n’est pas grave de perdre ou de tomber, du moment qu’on se relève 🙂